13 | 6365 Consultations
La tradition de l'amour courtois a été florissante dans l'Europe médiévale, d'abord en Occitanie puis dans le Nord de la France. Également appelé fin'amor en occitan, l’expression désigne la façon d'aimer avec courtoisie, comprenant des valeurs et du savoir-vivre, du respect et de l’honnêteté, dans le but commun d'atteindre le bonheur. On en trouve les premières traces dans les poésies des troubadours du Midi de la France, le pays d'oc. Quelles en sont les caractéristiques ? Quel rôle ont joué les troubadours ? De l’amour courtois à l’art de faire la cour, comment ce jeu de séduction a t-il évolué à partir du 17e ? Petit tour d’horizon.
Les caractéristiques de l’amour courtois
Il se joue autour de deux protagonistes : une « dame » (le terme est issu du latin « domina » soit une position dominante), mariée, souvent suzeraine (issue de la catégorie sociale la plus élevée comme par exemple l’épouse d’un seigneur) et un homme jeune, célibataire, souvent chevalier. Ce dernier se voit alors mis à l’épreuve : il doit se surpasser, montrer sa virilité, sa bravoure et son hardiesse (lors de tournois guerriers). Si la dame accepte les faveurs du chevalier, elle est à son tour prisonnière de l’amour et doit se livrer corps et âme, tout en ayant tout pouvoir sur lui. C’est un amour qualifié également de dangereux (puisque le chevalier va prendre des risques au combat) et d’adultère. En parallèle, la dame doit sauvegarder l’honneur de son mari et se préserver de la calomnie, l’adultère étant la pire des subversions pour une femme. Enfin, dans l’amour courtois, la beauté physique est un critère fondamental. C’est elle qui attire d’abord le regard du chevalier. Elle doit séduire, prendre soin de son apparence, se refuser longtemps et ne se donner que parcimonieusement, afin que le jeune homme apprenne à se maîtriser et à dominer son corps…
Le rôle des troubadours
Le terme de troubadour vient de l’occitan « trobador », qui signifie « celui qui trouve ». La plupart des troubadours sont des nobles et des seigneurs. Le plus connu est Guillaume IX d'Aquitaine, comte de Poitiers, un puissant seigneur. On trouve également des moines, des évêques (comme Folquet de Marseille), des fils de serviteurs, à l’instar de Bernard de Ventadour, et même de simples vagabonds. Les poèmes que les troubadours mettent en musique ne sont pas composés en latin mais en « langue vulgaire », autrement dit en langue d'Oc, parlée à cette époque dans le sud de la France. Leurs chansons expriment le plus souvent l’amour et l’exaltation du plaisir, comme dans la chanson de Guillaume IX : « Ainsi va-t-il de notre amour, Comme du rameau d'aubépine, Il s'agite toute la nuit, Livré au gel et à la pluie, Mais le soleil du lendemain, Chauffe et verdit feuilles et branches. » Dans sa chanson « can vei le lauseta mover », Bernard de Ventadour exprime les tourments que lui procure l'amour : « Messager, va et cours dire à la plus belle la peine, la douleur et le martyre que j'endure pour elle ». Les « dames de cœur » étaient attirées par ces rimes envoutantes et fleuries. Au début il s’agissait d’une sorte de cérémonial décent et érotique, puis avec le temps les chansons sont devenues plus populaires, et les messages explicites. Ainsi, commerçants, graveurs, ou tisseurs créaient des groupes de chorales, dont les chansons avaient pour but d’encourager la population à s’adonner à la libido. Certains tentaient par tous les moyens d’appâter la fille du village voisin en fredonnant des strophes de ces « chansons de courtoisie ».
L’amour courtois au 17 e, 18 e et 19 e siècle
Au 18e siècle, l'expression « faire la cour » signifiait « s'accorder les faveurs d'une personne » en référence aux personnes qui entouraient le roi. Plus tard, elle s'est étendue à d'autres personnes que le roi. Les demandes en mariage au 17 e ou 18 e siècle étaient organisées dans les sociétés de salon, lors de bals masqués. Le langage corporel faisait partie du flirt. Ainsi un éventail dans la main d’une dame signifiait aux hommes une disponibilité, une démarche gracieuse mais ambiguë : cela pouvait aller du désir de faire connaissance au refus. Placer l’éventail sur les lèvres signifiait « embrassez moi », remuer l’éventail dans la main droite signifiait « j’en aime un autre ». Ensuite la culture de salon Parisienne au 19 e siècle s’est développée ; on se rencontrait dans un environnement élégant, afin d’apprécier la culture, des repas et des boissons.
Quelques citations sur la notion de « faire la cour »
D’autres, arrivant à l’âge mûr, mettent toute leur vanité à oublier qu’un jour ils purent s’abaisser au point de faire la cour à une femme et de s’exposer à l’humiliation d’un refus […], Stendhal, De l’Amour, 1822
Cette pitoyable comédie, entremêlée de bouquets, de parures, de parties de spectacle, s’appelle faire la cour à sa prétendue. (Honoré de Balzac, Modeste Mignon, 1844)
Aujourd'hui, en amour, on ne fait plus la cour à une femme, on bouscule son jardin. (Pierre Dac, Les Pensées, 1972)
Il y a dans la notion de « courtiser » ou « faire la cour » une notion de temps et d’efforts : on faisait durer le plaisir… On est bien loin du monde pressé d’aujourd’hui où les démarches amoureuses s’effectuent la plupart du temps à travers les nouvelles technologies, via l’ordinateur et le smartphone, un peu à la va-vite et sans poésie - à part sur notre site qui, contrairement à ses concurrents, ne présente pas un format proche du catalogue et où les membres prennent leur temps pour se courtiser, n’est-ce pas ?? :-).
Qu’évoque pour vous l’art de courtiser d’antan ? Etait-ce mieux avant ou pas ?
Messieurs, comment vous y prenez vous pour courtiser une dame ??
Vos commentaires nous intéressent !
Photo © Adobe – Auteur : grape vein
Betty_Nelly, 09.07.2020